Ma première inspection : comment bien la préparer ?

Depuis la réforme de l’évaluation des enseignants mise en œuvre à la rentrée 2017, l'inspection telle qu’elle était a été remplacée par le « rendez-vous de carrière » et la notation, par une évaluation de compétences. L’objectif est surtout de transformer en profondeur le sens de cet évènement, du sommatif (« voilà ce que vous valez ») au formatif (« voilà ce sur quoi vous pouvez vous appuyer et ce que vous pouvez faire pour progresser »), vers la notion d’accompagnement professionnel.

Différentes visites officielles dans votre carrière d'enseignant. Trois rendez-vous de carrière sont proposés aux enseignants titulaires : aux 6e, 8e et 9e échelons (tous les sept ans environ). Chaque rendez-vous comporte trois phases : une visite en classe, un entretien avec l’inspecteur et un entretien avec le chef d’établissement. La première venue officielle dans votre classe sera sûrement celle de votre titularisation, avec souvent un enseignant formateur et non un inspecteur.

Les objectifs de ces rendez-vous. L’inspection n’a pas pour objectif de juger le travail ou l’enseignant lui-même. Il s’agit d’« un temps dédié pour porter un regard sur une période de vie professionnelle (...), un temps d’échange sur les compétences acquises et sur les perspectives d’évolution professionnelle ».

Des rendez-vous de carrière pour progresser : lors des rendez-vous des échelons 6 et 8, vous pouvez « gagner » un an dans votre tableau d’avancement. À l’échelon 9, vous pouvez accéder plus rapidement à la « hors-classe », une grille de rémunération supérieure. Mais surtout, le rendez-vous de carrière vous permet d’apprendre sur votre pratique et d’identifier des pistes de progression.

Des guides officiels à votre disposition : Pour vous renseigner sur les différentes modalités de ces rendez-vous, consultez les guides officiels proposés dans la rubrique « Textes et sites de référence ».

Venir observer les classes et échanger avec les enseignants ne constituent que deux des missions d’un inspecteur. Son rôle est aussi de garantir une cohérence entre les objectifs de l’institution et les pratiques réelles dans les classes. N’oubliez pas, son premier objectif en venant vous voir est de vous apporter des conseils personnalisés.

Relativisez ! Vous vous serez naturellement projeté(e) sur un déroulement idéal mais on sait bien que tout ne se déroule pas comme le dit la théorie. Votre capacité à faire face à l’imprévu, à réagir et à vous adapter sera elle aussi observée et testée durant les entretiens.

Utilisez vos « ratés » comme des points d’intérêt et d’amélioration. Si vous avez ressenti un échec durant votre cours inspecté, ne le taisez pas en entretien. L’aborder comme un élément à améliorer montre votre capacité à prendre du recul et réfléchir à vos pratiques.

Exercez votre droit à formuler des observations quant à l’évaluation dont vous avez fait l’objet. Lorsque vous recevrez le compte-rendu complété par l'inspecteur (et le chef d'établissement dans le second degré), vous aurez un délai de trois semaines pour formuler par écrit des remarques et demander une révision du document.

Communiquez autour de vous et rapprochez-vous des syndicats/associations qui vous aideront à adopter la posture et la stratégie les plus adéquates au regard de la situation vécue.

Si le but d’une inspection est avant tout de vivre un quotidien dans votre classe, il reste cependant nécessaire de bien s’y préparer. Les aspects administratifs doivent être maîtrisés pour éviter une source de stress supplémentaire le jour J et vous permettre de vous concentrer sur votre séance avec les élèves. Sans tout réinventer, celle-ci doit être préparée minutieusement car elle fera partie des indicateurs de votre professionnalisme. Optez pour un bon état d’esprit pour mettre toutes les chances de votre côté.

Suivez le calendrier administratif individualisé sur SIAE (Système d’Information d’Aide à l’Évaluation des personnels enseignants), un outil présent sur i-Prof (voir la rubrique « On a testé pour vous ! ») qui vous informe des différentes étapes du rendez-vous de carrière. Vous devrez notamment y valider les dates proposées par l’administration, dont celle de votre inspection en classe.

Mettez à jour votre cahier de textes numérique et rendez-le disponible à la lecture pour votre inspecteur. Depuis la rentrée 2011, il est obligatoire et constitue un document officiel à valeur juridique. Il fait la liaison entre la classe et la famille, ainsi qu'entre un professeur et son éventuel remplaçant par exemple. Il n’est pas nécessaire d’y écrire beaucoup de détails. Selon la circulaire n°2010-136 du 6-9-2010, « le cahier de textes de classe doit être de maniement facile, refléter le déroulement des enseignements et permettre de suivre avec précision la progression des apprentissages ».

Anticipez les conditions matérielles de la séance inspectée. Une fois la date et l’heure connues, vous en déduirez le groupe-classe avec lequel vous serez et la salle associée. Vous pourrez préférer une autre salle plus propice aux activités envisagées, avoir besoin de réserver une classe mobile de tablettes, etc. Faites en sorte que la salle soit libre au moins 30 minutes avant pour l’installer comme vous le souhaitez. Pensez à une place (ou deux) pour l’inspecteur (et éventuellement le chef d’établissement).

Jetez aussi un œil à l’emploi du temps des élèves concernés : il est important de savoir ce qui est prévu pour eux avant votre séance. Un cours d’EPS précède-t-il le vôtre ? Une récréation ? Un devoir sur table ? Pas de sortie scolaire prévue par un collègue ? Cela vous permettra d’anticiper d’éventuels retards qui pourraient fragiliser le début de votre cours et en réduire sa durée.

Prévoyez de quoi partager la « vision professeur » du cours : votre classeur de préparation de cours habituel ou un document créé spécialement pour la séance, présentant son contexte, ses objectifs et ses modalités. Il est aussi possible de préparer un ordinateur avec tous les documents utilisés par les élèves dans la séance, le cahier de textes, voire les documents partagés depuis le début de l’année.

• Préparer votre séance dans la continuité de tout votre programme. Il y a un cours avant et après l’inspection. Votre séance devrait donc s’inscrire dans une progression logique, au sein d’une séquence plus large. Préparez l’ensemble des séances avec lesquelles s’articule cette séance et anticipez votre préparation, au minimum deux semaines à l’avance : ce que les élèves auront à faire pour le jour de l’inspection doit être en cohérence avec le scénario prévu.
• Porter une attention particulière aux « pourquoi ? », qui correspondent aux objectifs de la séance et doivent être explicites, ainsi qu'aux « comment ? », c’est-à-dire aux modalités de travail avec les élèves. Seront-ils en groupes ? À quel moment ? Dans quel but ? Creusez également un peu plus la théorie autour de la séance pour gagner en distance didactique et pédagogique. La réflexion que vous mènerez vous servira aussi d’appui pour l’entretien avec l’inspecteur.
• Privilégier les types de scénarios déjà maîtrisés ou testez-les en amont. S’il n’est pas question de faire deux fois le même cours, il est conseillé d’avoir déjà expérimenté le dispositif pédagogique avant de l’utiliser en inspection. Au-delà d’une meilleure maîtrise du déroulé, cela vous permet de mieux anticiper les attitudes des élèves face à la tâche et de mieux gérer le temps. Cela vous offre aussi le recul nécessaire à l’analyse de vos choix. Aussi, pas de premier Escape Game avec vos élèves le jour de l’inspection !
• Bien prévenir vos élèves, l’idée étant qu’ils ne soient pas surpris et puissent eux aussi se préparer. Pas toujours facile de lever la main pour prendre la parole en classe, alors devant un inspecteur… Cependant, ne dramatisez pas l’évènement. Dites-leur que vous ne leur demandez rien de spécial, il leur suffit de faire « comme d’habitude ».
• Soigner le matériel pédagogique, en particulier la trace écrite de vos élèves. Vérifier leur(s) cahier(s) quelques séances avant l’inspection peut être une bonne idée. Si vous utilisez le numérique, pensez aussi à un plan B, en cas de dysfonctionnement. Votre capacité à vous adapter sera là encore mise en valeur.

Respirez ! Tout ne se joue pas sur le moment ! L’évènement étant rare, il est légitime d’accorder beaucoup d’importance à une inspection. Cependant, vous ne pourrez pas montrer l’ensemble de vos compétences et réalisations en 55 minutes de classe. Vous avez enseigné plusieurs centaines d’heures et avez déjà fait face à des aléas et des difficultés. Prenez cette visite de l’inspecteur comme un cas particulier de plus !

Anticipez. Au-delà de ce qu’il représente d’un point de vue institutionnel, l’inspecteur est aussi souvent un des rares adultes qui va pénétrer votre classe ; ce qui peut être déstabilisant. Aussi, pourquoi ne pas proposer à un collègue de venir assister à un de vos cours ? Vous pourriez faire de même, ce serait l’occasion d’avoir des échanges de pratiques professionnelles très fructueux !

Comptez sur le soutien de vos collègues. Discuter avec vos collègues des inspections vécues et des astuces de chacun est sûrement très bénéfique et instaure une certaine solidarité. N'hésitez pas à les solliciter sur les tâches annexes : une aide pour partager le cahier de textes numérique, des photocopies, un échange de salles, etc. Dans le second degré, appuyez-vous également sur votre chef d’établissement. Il est partie prenante de l'évaluation mais il vous connaît et saura sûrement vous aider à avoir confiance en vous.

Reposez-vous ! Bien reposé, vous aurez la capacité de dépenser l’énergie supplémentaire liée à la concentration et au (bon) stress générés par l’évènement. Pensez à apporter une bouteille d’eau en classe car l’émotion peut donner la gorge sèche et altérer votre posture et votre voix habituelles.

On projette souvent l’image de l’inspecteur au fond de la classe qui regarde l’enseignant interagir avec ses élèves. Pourtant, chacun sait - et l’inspecteur mieux que quiconque - que cette séance avec les élèves est un échantillon de l’activité pédagogique de l’enseignant. Si on peut déjà remarquer ses différentes postures et percevoir sa relation aux élèves en classe, c’est lors de l’entretien qui suit que se dévoile une grande partie de vos compétences et de votre style d’enseignement.

Téléchargez le document de référence de l’entretien pour votre rendez-vous de carrière (voir la rubrique « Textes et sites de référence »). Que vous décidiez de le transmettre à l’inspecteur et au chef d’établissement dans le second degré ou non (il est facultatif), prenez le temps de le compléter, au moins pour vous. Il vous permettra de faire le point sur votre parcours professionnel, vos compétences pédagogiques ou mises en œuvre dans votre environnement professionnel (collaborer avec ses collègues, organiser un voyage scolaire, accueillir les parents, etc.). Vous pourrez aussi y formuler des souhaits d’évolution professionnelle, mettant ainsi en valeur la continuité de votre parcours.

Prenez connaissance du référentiel des compétences professionnelles des métiers du professorat et de l’éducation. Vous pourrez, pour chaque compétence, identifier les éléments de votre activité professionnelle qui en témoignent. Il est fort probable que vous identifiez alors des points faibles et c’est normal ! La bonne nouvelle, c’est que vous venez de trouver des pistes d’amélioration à évoquer lors de l’entretien !

Référez-vous également au calendrier d’une campagne de rendez-vous de carrière (annexe 2 du guide) qui, en fonction de votre fonction, vous informera sur le type d’inspection et d’entretien(s) dont vous ferez l’objet.

Lisez la grille d’évaluation, en annexe 3 du guide, qui sera utilisée par l’inspecteur (et pour certains items, par le chef d’établissement dans le second degré). Il est toujours bon de connaître ce sur quoi on va être évalué et vous serez alors plus à l’aise pour répondre en y ayant réfléchi en amont !

Mettez-vous en valeur sur i-Prof ! C’est le moyen officiel utilisé par l’institution pour suivre la carrière des enseignants. Une rubrique « votre CV » vous permet d’y mentionner vos diplômes, vos formations (celles du Plan Académique de Formation y sont automatiquement ajoutées), vos compétences et les missions ou activités que vous avez menées. Soyez prolixe ! Si lors de l’entretien, une certaine modestie est de mise, n’hésitez pas à alimenter largement votre CV. Ce dernier sera consulté et pris en compte par vos évaluateurs.

Préparez-vous à remettre en question votre pratique. Lors de la préparation de votre inspection, vous avez beaucoup réfléchi, exploré les possibles et fait des choix. Cependant, acceptez de faire un pas de recul et de vous placer en quelque sorte « aux côtés » de l’inspecteur pour analyser avec lui votre pratique, quitte à parfois la remettre en question.

Réfléchissez à vos valeurs, ce sur quoi vous ne transigez pas. Que ce soit la rigueur didactique, le développement de la coopération entre les élèves ou encore la sécurisation des plus faibles, chaque enseignant possède des points fondamentaux d’ancrage de ses pratiques. Lors de l’entretien, il ne s’agira pas de remettre en cause vos valeurs mais plutôt les moyens que vous avez choisis pour les faire vivre. Sur la façon de s’y prendre, on peut toujours s’améliorer et la critique constructive est alors la bienvenue !

Travaillez votre réflexivité. En théorie, la discussion avec l’inspecteur est un entretien d’explicitation. Son but est de trouver un équilibre entre générer une prise de conscience chez l’enseignant et formuler des conseils. On devrait vous poser des questions commençant par « Comment… ? » plutôt que de vous demander de vous justifier avec des « Pourquoi… ? ». La réflexivité consiste à se regarder pédaler et à comprendre comment l’on pédale. Vous pouvez vous y essayer n’importe quand, avec un(e) collègue par exemple.

Identifiez des pistes de progression. Aucun enseignant n’est parfait, et le métier s’apprend tout au long de la vie. Même si l’entretien fera sûrement émerger les points d’amélioration, il est intéressant d’avoir réfléchi en amont à quelques pistes d’évolution de votre pratique : plus de coopération entre les élèves ? Une attention plus forte vis-à-vis des élèves en difficulté ? La différenciation pédagogique ? Davantage de numérique en classe ? Une pédagogie inversée ? Ludifiée ? Il existe de nombreuses possibilités d’enrichir ses pratiques.

Oubliez la perfection. Aucune séance de cours n’est parfaite ! Que vous soyez pris(e) de court par le temps ou déboussolé(e) par une réponse d’élève, il y aura toujours une part d’imprévu. Pourquoi n’y aurait-il pas aussi de bonnes surprises ? Par ailleurs, la justesse de votre regard sur la séance comptera davantage que son adéquation avec ce que vous aviez prévu.

Renseignez-vous sur votre inspecteur. Bien que porteurs des mêmes positions institutionnelles, les inspecteurs ont chacun leur penchant pour telle ou telle pratique de classe, tel ou tel aspect de la posture enseignante. Il est toujours utile de connaître un peu son interlocuteur.

Préparez-vous à rester ouvert(e) à la critique de votre pratique. Faites bien la distinction entre la critique d’un choix ou d’un geste professionnel et celle de votre personne. Puisqu’il ne s’agit pas de vous personnellement, acceptez le regard analytique de votre interlocuteur et essayez de l’adopter également.

Visualisez votre entretien de façon rationnelle et positive. Projetez à votre cerveau des images positives et des situations de réussite. Par exemple, vous pouvez imaginer des félicitations sur l’originalité de votre séance, la proposition d’une mission intéressante ou le partage réussi d’une idée qui vous tient à cœur. Vous vous mettrez ainsi en confiance et évacuerez un peu de mauvais stress.

Il est indispensable de tester suffisamment ces outils avec les élèves avant votre rendez-vous pour être à l’aise et que leur usage soit naturellement intégré dans le cours.